Ce récit se situe au vieux temps des croisades
Lorsque Français, Anglais et Germains par myriades
Voulurent arracher la Terre Sainte en orient
Au pouvoir de l’émir, commandeur des croyants.
Mais Saladin, sultan d’Égypte et de Syrie,
Ayant repoussé toute la chevalerie
Que dirigeait les rois des pays d’occident,
Garda Jérusalem aux mains des musulmans.
Or l’histoire montra de façon unanime
Que Saladin était un prince magnanime
Débonnaire, affable car même tolérant
Dans la Ville Sainte juifs et chrétiens d’orient.
Sa prodigalité étant même excessive
Et les fonds du sultan étant à la dérive,
Dans le but d’emprunter une somme d’argent,
Saladin convoqua un juif nommé Nathan,
Un très riche marchand, avisé personnage,
Surnommé par tout le peuple Nathan le Sage.
Mais Saladin, mettant ce projet de côté,
L’interrogea sur un point qui le tourmentait.
Il se demandait comment il était possible
Que les trois religions procédant de la Bible,
Juive, chrétienne et musulmane, en vérité,
Puissent avoir entre elles autant d’hostilité ?
Et laquelle des trois traditions vénérables
Était selon lui la religion véritable ?
Devant cette question délicate, Nathan,
Comme de coutume se montra très prudent
Et au grand Saladin le sultan, son altesse,
Commença à narrer ce conte de sagesse :
Dans des temps fort anciens il était une fois
Une vaste contrée gouvernée par un roi.
Dans ce pays heureux on ignorait la guerre ;
La paix et l’harmonie avaient rendu prospères
Ce royaume enchanteur et tous ses habitants.
Il en était ainsi déjà depuis longtemps
Car la lignée des rois, se passait d’âge en âge,
Un talisman, fleuron du royal héritage,
Une bague d’une inestimable valeur,
Opale chatoyante de mille couleurs.
Or il se cachait dans cette superbe pierre
Une vertu secrète et très particulière :
Celui qui portait à son doigt l’anneau précieux
Se rendait agréable aux hommes et à Dieu.
Confiant dans le pouvoir de la bague magique,
Il connaissait ainsi un destin magnifique
De souverain comblé de richesses et d’honneurs
Et de tout son royaume il faisait le bonheur.
En suivant alors la tradition féodale,
Chaque roi à son tour transmettait cette opale
De même que son trône à son fils préféré
Et des siècles connurent ce rite sacré
Jusqu’au jour où un roi eu ce cas de conscience :
Il lui échu trois fils doués d’intelligence,
De bonté, de noblesse. Les aimant tous les trois,
Il lui était impossible de faire un choix.
Mais son âge avancé et sa santé précaire
Rendait évidemment tout à fait nécessaire
Que très rapidement il se décide enfin
A désigner le fils qui serait son dauphin.
Alors il convoqua un joaillier habile
Auquel il commanda un travail difficile :
Créer deux nouvelles bagues parfaitement
Identiques à celle du fameux talisman.
L’orfèvre y réussit et jura le silence
Et le roi, constatant l’absolue ressemblance
Des bijoux, ne put discerner décidément
Lequel des trois anneaux était le talisman.
Enfin le souverain, renonçant à son trône,
Divisa en trois parts son immense royaume
Et à chacun des princes il donna à la fois
Un tiers du territoire et le titre de roi
Ajoutant à cela, la prétendant unique,
L’inestimable don de la bague magique ;
Chacun des fils étant tout à fait convaincu
D’être seul héritier d’un pouvoir absolu.
Après ce partage, bien des années passèrent
Lorsqu’un jour, l’ancien roi, retiré des affaires,
Voulut savoir lequel des jeunes souverains,
De l’aîné, du puiné ou bien du benjamin,
Avait pu, comme lui pour son pays naguère,
Rendre son royaume florissant et prospère
Et dans quel pays se trouvait finalement
L’opale magique, le fameux talisman.
Arrivé chez l’aîné, il vit que deux des frères
Se trouvaient en conflit et se faisaient la guerre ;
Leurs deux royaumes ainsi que leurs populations
Étaient dans la terreur et dans la destruction.
Mais lorsque le vieux roi visita le troisième,
Il trouva le pays dans un bonheur extrême
Identique à celui qui régnait de son temps
Et la paix et la joie comblaient ses habitants
Ainsi donc, c’était lui qui eut en héritage
Le magique joyau au moment du partage ;
C’était le benjamin, le plus jeune des trois,
Qui portait donc le vrai talisman à son doigt.
Alors Saladin dit : « J’aime beaucoup les fables
Et ton conte est vraiment tout à fait agréable,
Mais je n’y vois pas de réponse à ma question
Ni de comparaison de nos trois religions. »
« Mais, répondit Nathan, l’analogie limpide
Nous montre le chemin et par la main nous guide :
Il nous appartient donc, ainsi que le vieux roi,
De bien considérer pour chacune des trois
Ce qu’elle a apporté à son peuple fidèle :
Guerres et dévastation, rivalités cruelles
Ou une heureuse vie dans la félicité,
L’harmonie et la joie et la prospérité.
Nous devons tous faire un examen de conscience :
Celle qui apporte la paix et l’abondance,
Une vie de bonheur et de bénédictions,
Alors, oui, celle-là est la vraie religion !»
Avril 2025
Très éclairant ce conte poétique ! Il nous suggère que la véritable religion n’est pas encore parvenue sur cette terre. Ou alors il y a très longtemps.
En effet, laquelle de ces trois religions monothéistes a amené la paix, la prospérité, la liberté, la fraternité ?
À moins que chacune d’entre elles possède les énergies de toutes ces vertus mais que le vecteur humain ne soit pas encore capable de les faire vivre ?
On n’a pas fini de travailler sur nous-mêmes pour faire éclore cette nouvelle humanité.
Une fois que la Terre nous aura purgé de ce qui la fait souffrir, peut-être ? Ce ne sera pas sans douleur; ces douleurs que sont les guerres, maladies, famines, cataclysmes… et ça a déjà commencé depuis longtemps. Mais les humains ne font pas le lien de cause à effet.
S’il suffisait d’une bague…
J’adore ☺️ comme d’habitude
Merci Arnaud