Le vieillard et l’enfant
Contemplez ce bébé, tête blonde charmante,
Regardez-le courir, sauter, rire et crier,
Un rayon, une fleur, une étoile l’enchante,
Rien dans son innocence ne peut l’effrayer.
Point d’alarme ou de peur dans ces yeux si limpides,
Qui regardent la vie de toute leur fraîcheur ;
Il ne sait rien encor, sa jeune tête est vide
Mais son cœur déborde d’enthousiasme et d’ardeur.
Et voyez donc aussi cette tête chenue
D’un vieillard dont le dos est courbé par les ans.
Les choses de la vie lui sont toutes connues,
Expérience et sagesse étant filles du temps.
Il est plein de savoir mais au fil des années
Son cœur s’est refroidi, souvent blasé, lassé,
L’amour n’y coule plus, sa jeunesse est fanée,
La tête est pleine mais le cœur souvent glacé.
Ni l’aïeul ni l’enfant ne sont guère capables,
Bien qu’ils soient attachants, d’agir comme il convient ;
L’enfant est plein de feu mais guère raisonnable,
L’ancêtre a le savoir mais ne désire rien.
On a besoin des deux pour créer l’action libre :
Une idée dans la tête et un désir au cœur
Il faut deux jambes pour marcher en équilibre,
Et pour agir il faut le dessein et l’ardeur.
On voit de plus en plus à l’époque présente
Cette curiosité chez de nombreux humains :
Un cœur froid et blasé et, de façon fréquente,
La tête plus vide que celle d’un bambin.
Or voici le secret par lequel on dépasse
L’ordinaire et atteint des sommets triomphants :
Avoir les deux, bien sûr, mais à la bonne place,
La tête d’un vieillard et le cœur d’un enfant.
Janvier 2025