L’attitude sacrée
Ô bois charmants, vallons, ô campagne fleurie,
Rivières qui courez dans de vertes prairies,
Ô profondes forêts d’arbres majestueux
Tels de vivants palais immenses et somptueux,
Ombre pleine de vie fraîche et hospitalière
Percée par les traits d’or des rayons de lumière,
Ô grandioses montagnes, ô géants audacieux
Qui d’un élan puissant avez hissé aux cieux
Vos farouches sommets et vos crêtes sauvages,
Royaumes aériens de l’aigle et du nuage,
Ô neige immaculée, blancs glaciers, ô lacs purs,
Grands miroirs limpides qui reflètent l’azur,
Chastes sources cachées en de doux nids de mousses,
Ruisseaux qui murmurez vos berceuses si douces,
Ô Nature éternelle aux multiples splendeurs
Où foisonnent à travers un éden enchanteur
Tous les règnes de vie de la faune et la flore
Et d’autres méconnus, mystérieux encore,
Mon œil à tes beautés n’est pas indifférent.
Je ne viens pas vers toi d’un pas de conquérant,
Et ne veux pas défier tes roches ni tes cimes,
Ni braver, imprudent, tes gouffres ou tes abîmes,
Car je ne cherche ni la gloire ni l’exploit
Et ne suis pas de ceux qui ignorent tes lois.
Surtout je ne veux pas t’infliger de blessure,
Ni faire aucun mal à la moindre créature,
Ni chasser ni tuer d’innocents animaux,
Ni répandre la mort, ni t’accabler de maux.
Pour moi, tu n’es jamais une terre conquise
Et je ne voudrais pas, au nom de l’entreprise,
Exploiter tes richesses en un esprit marchand.
Savoir te respecter simplement en marchant,
Découvrir chaque jour de nouvelles merveilles,
Parcourir tes chemins sans que mon pas n’effraye
Les hôtes de tes bois, de tes lacs, de tes champs,
Vivre avec le soleil du lever au couchant.
Ne produire aucun bruit troublant ton harmonie
Ni salir ta beauté que le ciel a bénie,
Mais m’approcher de toi plein de respect toujours,
Mes yeux dans ta splendeur et le cœur plein d’amour,
Admirer dans la nuit tes étoiles au ciel ample,
Me recueillir en toi de même qu’en un temple,
Car tu es, Création, le véritable lieu
Où l’âme communie de la terre jusqu’aux cieux
Et ta voûte azurée, divine basilique,
Nous relie mieux à Dieu que des arches gothiques.
Tes sublimes beautés, ta force et ta grandeur
Sans cesse glorifient le divin Créateur
Et ton universel, grandiose sanctuaire
Stimule la foi plus qu’une église de pierre.
Tu recèles en ton sein encor bien des secrets
Et seuls ceux qui te portent un sentiment sacré
Pourront peut-être un jour connaître tes mystères.
De même que ces fleurs qu’épanouie la lumière
Dévoilent au matin leur beauté au grand jour,
Isis, tu ne t’ouvres qu’aux rayons de l’amour.
Petits êtres humains, fragiles et éphémères,
Nous sommes tes enfants, Ô éternelle Mère,
Et ta terre bénie qui fut notre berceau
Nous bercera encor dans ses bras au tombeau.
Notre âme en te rendant, avec reconnaissance,
Ce vêtement tissé lors de notre naissance,
A tes splendeurs fera un provisoire adieu
Avant de s’élancer vers le pays radieux.
Mais avant la venue de l’heure inévitable,
Je voudrais chaque jour, ô Mère vénérable,
A l’automne, en hiver, au printemps, en été,
Communier encor à toutes tes beautés,
Me purifier auprès des vivantes cascades,
Écouter des oiseaux les gracieuses aubades,
M’enivrer des couleurs et des parfums subtils
Dont tes exquises fleurs nous font grâce en avril,
Boire tôt le matin quand le ciel est sans voile
La prodigieuse vie fusant de notre étoile,
Longuement contempler tes horizons bénis
Pour me lier grâce à toi aux mondes infinis.
Arnaud Jonquet avril 2007