A l’orée d’un nouveau millénaire
Parvenue à l’orée d’un nouveau millénaire,
Au début de ce siècle atteignant ses vingt ans,
L’humanité plongée dans la haine et la guerre
Va-t-elle pouvoir un jour faire un pas en avant ?
Qu’on ne nous parle pas des progrès de la science
Brandis comme témoins de civilisation
Alors que l’on déserte la moindre conscience
Dont l’homme doit faire preuve en toutes ses actions !
Où est donc ce progrès dont certains se réclament
Dans ce monde régi par le feu et le sang ?
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme »
Prévenait Rabelais, un esprit vigilant.
Voyez dans ce pays, jadis ma « doulce France »,
En Europe ou dans le monde, de toutes parts,
Grandir le fantôme d’une vraie décadence
Qui, de la morale, détruit tous les remparts !
L’homme perd ses repères et toujours plus s’égare ;
Pour un bref aujourd’hui, il condamne demain.
Voyez notre planète livrée aux barbares
Qui transforment la terre en un monde inhumain
Exploitant à l’excès toutes les forces vives,
En un total mépris pour ce qui est vivant.
Peut importe l’action si elle est lucrative ;
On vend n’importe quoi, du moment que l’on vend !
Le credo des nations est ce seul mot : croissance !
Et devant ce veau d’or, tel un dogme absolu,
On va sacrifier tout, faisant de l’existence
Une pauvre vie d’où le bonheur est exclu.
Voyez ces imposteurs, qu’on dit « économistes »,
Leurs fausses théories, dont l’humain est absent,
Rendre nos jours mornes et nos lendemains tristes
Vouant le monde à la tyrannie de l’argent !
Sociétés anonymes aux trop riches actionnaires
Dont le sombre idéal a comme nom : profit
Vous réduisez les peuples à la pire misère,
Ôtant le pain aux bouches des plus démunis !
Voyez donc notre terre mise en coupe réglée
Les rendements poussés jusqu’à la déraison,
Les sols surexploités d’une terre épuisée
Qu’on gave toujours plus de chimiques poisons,
Ces affreux amas de scories industrielles
Que sans aucun scrupule on jette n’importe où,
Les mers, fleuves, océans transformés en poubelles,
Les rivières et les lacs devenus des égouts !
D’ ancestrales forêts qui sont livrées aux flammes,
Des incendies couvrant des continents entiers
Que des hommes ignorants, aveuglés ou sans âme
Allument sans souci des effets meurtriers !
Afin de satisfaire la gourmandise humaine,
Des millions d’animaux chaque jour massacrés,
Atrocités pires qu’aux antiques arènes
De ces sanglants bourreaux pour qui rien n’est sacré !
Plus révoltant encor que ces actes sauvages
Est l’exploitation d’hommes, de femmes et d’enfants,
Que le dénuement tient en état d’esclavage
Par le cynisme humain dans le mal triomphant !
Se croyant supérieur à toute la Nature,
L’homme sur la terre se comporte en tyran
Provoquant d’équilibres subtils la rupture
Dont les effets deviennent à présent effarants.
Le monde assiste à des catastrophes dantesques :
La terre explosant par l’éruption de volcans,
Le feu dévorant des incendies gigantesques,
L’air dévastateur des tempêtes et ouragans,
Et l’eau dont le niveau de plus en plus menace
Des îles, des contrées et des pays entiers
Gonflant les océans par la fonte des glaces,
De colossaux massifs chaque jour liquéfiés !
Désastres climatiques, toujours plus et encore,
Déclenchés par l’homme, cet apprenti sorcier
Qui provoque, en ouvrant la boîte de Pandore,
La pluie de fléaux sur le monde terrifié !
Et dans tout ce chaos on voit nos responsables,
Les chefs, les dictateurs, les rois, les présidents,
Telle l’autruche enfouir la tête dans le sable
En une démission sans aucun précédent !
Tous feignent d’ignorer et chacun capitule
Alors que ce drame est de tout le plus urgent ;
La terre est devenue une maison qui brûle
Où l’on entend parler que de questions d’argent !
Ils défont les unions et brisent les ententes ;
Chaque pays, méfiant, se referme sur soi.
Le concert des nations que l’égoïsme hante
Ne laisse entendre que de discordantes voix.
Et pendant ce temps-là de nombreux peuples souffrent
Mais à tous ces malheurs les États restent sourds ;
L’humanité bientôt se rapproche du gouffre
Et aura dépassé le point de non-retour !
A part quelques efforts qui semblent dérisoires,
Le monde se résigne à la fatalité ;
Ce siècle sera-t-il le dernier de l’histoire,
Un échec absolu de notre humanité ?
Vivrons-nous bientôt ces catastrophes antiques
De civilisations réduites à néant
Lors d’un effondrement au sein de l’Atlantique
Englouties sous les flots d’un tsunami géant ?
Faut-il donc qu’à nouveau ces épreuves surviennent
Que les malheurs s’abattent sur le genre humain
Pour qu’il s’éveille enfin, réfléchisse et comprenne
Que pour survivre il doit prendre un autre chemin ?
Rares sont ceux qui savent que tout s’enregistre
Autour d’eux et surtout en leur for intérieur ;
Tous leurs actes qu’ils soient vertueux ou sinistres
Tôt ou tard leur reviennent en bien ou en malheur.
Qu’ils tremblent maintenant ceux qui, par égoïsme,
Goût de lucre, mépris, haine ou méchanceté
Ont nourri et poussé jusqu’à son paroxysme
Cet égrégore noir menaçant d’éclater !
Car la loi du karma leur annonce des larmes
Et pose sur leur tête des charbons ardents !
Combien de cris seront couverts par le vacarme,
Et combien de sanglots, de grincements de dents !
Nul homme ne peut dire : « Après moi le déluge !»
Car l’implacable loi des causes et des effets
Toujours le trouvera quelque soit son refuge
Imposant le paiement de ce qu’il aura fait.
N’entend-t-on pas déjà le tumulte qui gronde
Dans ces calamités qui frappent les nations ?
De sombres événements peuvent à travers le monde
Plonger l’humanité dans les tribulations !
Devra-t-elle, en vivant une époque terrible,
Payer de ses erreurs l’effroyable rançon
Et, passant à travers ce redoutable crible,
Tirer de ses souffrances une vaste leçon ?
Ceux qui seront un jour l’humanité restante
Pour survivre devront après ces convulsions
Fonder leur vie sur des conceptions différentes
Permettant d’amorcer une vraie rédemption.
En cessant de porter aux nues l’intelligence
Qui sépare et divise toujours les esprits
Ils donneront au cœur une prééminence ;
A ce cœur tant moqué, délaissé, incompris.
L’amour sera enfin placé devant la science,
L’humilité devant la passion du pouvoir,
La douceur, la bonté devant toute violence,
Et l’« être » en premier lieu au-dessus de l’« avoir ».
Des Évangiles alors retrouvant la lumière,
Flambeau qui, en secret, a toujours resplendi,
Tous les hommes pourront vivre comme des frères
Faisant de la terre un jardin de paradis.
Le temps sera venu d’une ère d’harmonie,
Où l’homme avancera dans un nouvel essor,
Une époque d’amour, de sagesse bénie
Qui sera le début d’un nouvel âge d’or.
Arnaud Jonquet janvier 2020