L’espace semble vide et la campagne inerte ;
Sous les cieux encombrés de gros nuages lourds,
Les champs sont désolés et la forêt déserte
Est pleine de silence en ses profonds bois sourds.
Un humide brouillard sur les prés et les chaumes
Recouvre les vallons de son épais manteau
Changeant arbres et bêtes en de vagues fantômes
Surgissant çà et là sur les flancs des coteaux.
Et puis, venant enfin disperser cette brume,
Souffle la tramontane ou bien le vent d’autan
Versant un froid crachin sur les labours qui fument
Et partout des ruisseaux s’écoulent en chuchotant.
Mais parfois, certains jours, par quelque féérie,
Soudain les cieux s’éclairent et de puissants rayons
Viennent revivifier les bois et les prairies ;
L’on perçoit vaguement une libération,
Comme un nouvel élan flotte dans l’atmosphère,
Soudain dans la nature une âme a tressailli…
On entend à nouveau la chanson familière
Des gazouillis d’oiseaux jouant dans les taillis.
Les taches de couleur çà et là apparaissent
De quelques fleurs hardies qui prennent leur essor.
Devançant les bourgeons tout gonflés de promesses,
Le mimosa radieux a fait jaillir son or.
Vers la fin de janvier, la nature incertaine
Hésite entre l’hiver et l’appel du printemps ;
La nouvelle saison n’est-elle pas lointaine,
Tout est encor glacé, humide, mais pourtant,
Sous l’ardeur du soleil tout frémit et tout vibre,
Par la sève et le sang la nature répond ;
Plantes, bêtes et humains ressentent dans leurs fibres
Tout l’amour des cieux dans ces caressants rayons.
Le royaume céleste est notre vraie patrie;
Bénis soient ces très doux et trop rares moments
Lorsque la campagne, sous le soleil ravie,
Entrouvre un peu l’hiver sa fenêtre au printemps.
Arnaud Jonquet janvier 2016