Seulement dix travaux avaient été prévus
Par le roi Eurysthée au début de l’histoire
Mais, on ne sait comment, ce prince s’aperçut
Que dans deux cas sur dix, une aide très notoire
Avait été fournie à cet auguste héros.
Par conséquent le roi, d’un naturel perfide,
Pour sanctionner l’aide reçue d’Iolaos,
Décréta ces travaux comme étant non valides
Et il lui assigna donc deux nouvelles missions.
Il ordonna d’abord au colosse intrépide
D’apporter au palais un présent d’exception :
Quelques pommes d’or du jardin des Hespérides11 .
Ces filles d’Héra et d’un célèbre Titan,
Atlas, qui sur son dos tenait des cieux la voûte,
Vivaient en un jardin de l’extrême occident
Dont l’endroit était tenu secret, on s’en doute.
Voici donc Hercule reparti à nouveau
En direction de la péninsule ibérique,
Là où il captura des bœufs roux le troupeau,
Afin de découvrir ce jardin féérique.
Malgré ses recherches, ne pouvant déceler
Où était de ce lieu la très secrète entrée,
L’athlète décida qu’il irait consulter
Un des frères d’Atlas, le Titan Prométhée.
Ce géant qui, aux hommes, avait donné le feu
Fut condamné par Zeus à une peine atroce :
Il se trouve enchaîné à un piton rocheux
Tout en haut du Caucase et un aigle féroce
Lui dévore le foie, éternel châtiment
Car l’organe rongé, la nuit se régénère…
Mais le Caucase est loin, sur l’autre continent ;
Le héros partit donc en direction contraire
Vers l’orient à présent, revenant sur ses pas.
Il longea par le sud la Méditerranée
Mais il fut retardé par un nouveau combat
En terre de Cyrène12 où le défia Antée.
Ce roi, fils de Gaïa13 , féroce et querelleur,
Tirant de la terre son incroyable force,
Avait tué déjà beaucoup de voyageurs.
Les deux lutteurs alors s’attrapent par le torse,
Le combat est serré; Hercule plusieurs fois
Envoie rouler au sol son puissant adversaire
Mais, très rapidement, le héros s‘aperçoit
Qu’Antée reprend des forces au contact de sa mère;
Changeant de stratégie, il enserre en ses bras
Tout le buste d’Antée et, d’un coup, le soulève.
Alors, coupé du sol, celui-ci se débat
Mais, trop faible, il s’épuise et la lutte s’achève
Quand Antée, étouffé, sombre dans le trépas.
Le héros repart sur les côtes africaines
Mais soudain en Égypte une armée de soldats,
Au nom de Busiris, le pharaon, l’enchaîne
Et, en son grand palais, le livre au souverain.
Ce monarque cruel, très fier de cette prise,
Offre un grand banquet où notre Hercule, serein,
Montre la démesure de sa gourmandise.
Le pharaon s’approche à la fin du repas
De son invité qui doit être sa victime,
Son poignard dégainé mais ne fait que trois pas
Avant de recevoir le paiement de ses crimes,
Car Hercule, d’un bond, ayant cassé ses liens,
D’un formidable coup asséné sur la tête,
Renvoya ce sire devant Zeus olympien
Puis hors d’Égypte fuit pour reprendre sa quête.
Marchant vers le nord-est, il poursuit son chemin
Atteint finalement près de la mer Caspienne
Le massif du Caucase à l’est du Pont-Euxin.
Il atteint sur un pic les roches aériennes
Où le grand Prométhée se trouvait enchaîné
A l’heure où le rapace s’attaquait à son foie.
De l’arc de notre héros jaillit, instantané,
Un trait qui atteint l’aigle et, d’un coup, le foudroie.
Hercule délivre des chaînes le Titan ;
En retour celui-ci volontiers lui indique
Le seul itinéraire secret permettant
De retrouver là-bas sur la terre ibérique
L’entrée de ce jardin tellement convoité.
Le champion repartit, toujours infatigable,
Vers du lointain ponant l’ultime extrémité,
Mais afin d’éviter les grands déserts de sable,
C’est par la côte nord de la mer qu’il choisit
De rallier cette fois les terres occidentales.
Prométhée lui donna un conseil qu’il suivit
Pour pouvoir ramener ces pommes idéales :
Au lieu d’aller lui-même en ce jardin secret,
Envoyer Atlas, des Hespérides le père,
Pour lui-même cueillir en demeurant discret
Quelques uns de ces fruits tenus pour légendaires.
Le colosse acquiesça à une condition :
Que pendant sa cueillette Hercule le remplace
Et assure pour lui sa fameuse mission :
Soutenir sur son dos des cieux l’énorme masse.
Hercule accepta mais, quand le géant revint
Lui proposant d’aller jusqu’en Grèce lui-même
Porter à Eurysthée les trois fruits dans sa main,
Il ne fut pas dupe et usa d’un stratagème.
Le héros approuva tout en lui demandant
De prendre le relai sous la céleste voûte
Afin de délasser ses épaules un instant
Ce qu’Atlas, ingénu et dépourvu de doute,
Accepta. Or reprenant du dôme le poids,
Il vit Hercule au sol faisant vite main basse
Sur les fruits puis, après un salut très narquois,
S’enfuir bien vite au loin ignorant ses menaces.
Le retour au pays une nouvelle fois
Fut par la côte nord méditerranéenne
A travers l’Ibérie et le pays gaulois,
L’Italie, la Grèce et la ville de Mycènes.
Hercule put ainsi, arrivé à bon port,
Donner à Eurysthée, honorant sa demande,
Du jardin des nymphes les trois divins fruits d’or,
C’est du moins ce que dit cette ancienne légende.
Ce travail, le onzième de notre héros
Se trouve relié au signe de la Balance
Dominée par Vénus, de nom grec Hespéros,
De cette planète indiquant la radiance
Lorsqu’au soir on la voit qui brille dans la nuit.
La saison de ce signe se trouve en automne
L’époque de l’année où l’on cueille des fruits;
C’est un autre indice que le récit nous donne.
Le disciple devra pour son évolution
Échapper à l’emprise et à la tyrannie
Des défauts que sont paresse et indécision
Pour mieux développer beauté et harmonie.
11 Ce nom signifie « Occidentales »
12 La Lybie
13 Déesse de la Terre