Poussés par un bon vent, ils marchaient à la voile
Mais durent, épuisés, faire vite une escale
Et trouvèrent enfin dans leur proximité
Une île possédant un mouillage abrité.
Tous étant accablés, Ulysse et l’équipage,
L’esprit encor hanté par cet affreux carnage,
Pendant plus de deux jours sans quitter le bateau,
Dans ce paisible endroit, s’accordèrent un repos.
Le troisième matin, son arc en bandoulière,
Ulysse, en éclaireur, quitta seul la galère
Et monta au sommet d’une proche hauteur
Pour de l’île juger l’apparence et l’ampleur.
Il remarqua bientôt, mais à grande distance,
La fumée provenant de quelque résidence
Sûrement établie en un lieu fort discret
Car se trouvant au sein d’une épaisse forêt.
Remettant à plus tard l’exploration de l’île,
Alors qu’il revenait vers le havre tranquille,
Au seuil de la forêt, il aperçut soudain,
A quelques pas de lui, un magnifique daim
Et l’ayant abattu de deux habiles flèches,
Il revint au bateau chargé de viande fraîche.
Après un bon repas, presque un petit festin,
Ulysse raconta ce qu’il vit le matin
Qui prouvait que cette île n’était pas déserte.
Mais de tous les marins du fils de Laërte,
Pensant au sort subi par leurs feu compagnons
Sur l’île du cyclope ou bien des Lestrygons,
Aucun membre de l’équipage ne voulut
Une nouvelle fois partir à l’inconnu.
Après moult palabres, Ulysse enfin parvint
A finalement en décider quelques-uns
Qui choisirent comme chef, après ce long colloque,
Un de ses lieutenants, le prudent Euryloque,
D’Ulysse le beau-frère et compagnon aimé.
Il partit en tête d’un groupe bien armé,
Vingt soldats équipés et en tenue de guerre
Qui, d’un pied résolu, sur le sol s’engagèrent.
Ils traversèrent l’île et, sans même un arrêt,
Sans peine trouvèrent au fond de la forêt
En un lieu dégagé un superbe domaine,
Où de vertes pelouses et de fraîches fontaines
Entouraient joliment un palais fastueux.
Ils entendirent aussi le son mélodieux
D’une voix féminine aux accents angéliques
Qui tissait en chantant sous un vaste portique.
La femme, qui semblait maitresse de ces lieux,
Aux hommes grecs fit un accueil fort gracieux
Leur proposant d’entrer et de s’asseoir à table
Afin de prendre dans sa demeure agréable
Du repos ainsi qu’une bonne collation.
Sans attendre d’Euryloque l’approbation,
Fatigués, les marins composant la cohorte
Entrèrent sans leur chef demeuré à la porte.
La femme servit à ses nombreux invités
Des mets délicieux et un breuvage enchanté.
A peine eurent-ils bu, qu’à la même seconde,
Tous furent transformés en des pourceaux immondes
Et la magicienne, insensible à leur sort,
Dans une porcherie les enferma alors !
à suivre