Il existe là-bas dans la lointaine Asie
Au fabuleux pays des brahmanes hindous
Un mythe très ancien rempli de poésie
Et de sagesse que racontent les Saddous.
Cette histoire remonte au temps de l’innocence,
Quand les cœurs étaient purs et les fronts radieux,
Au lointain passé où, avant leur décadence,
Les hommes primordiaux étaient encor des dieux.
Ces divins apprentis ont-ils fait des bêtises
Comme en firent les dieux des grecs et des romains ?
Faiblesses qui là-haut ne sont jamais de mise,
Vous chassant de l’Éden du jour au lendemain.
Le conte ne dit pas ce qui causa sa ruine,
Nous savons simplement, et c’est sans doute mieux,
Qu’ayant abusé de sa nature divine,
L’homme encourut alors la colère des cieux.
Cet Olympe de l’orient ne pouvant permettre
De semblables fautes, somme toute il advint
Que Brahma décida, étant des dieux le maître,
De soustraire à l’homme son grand pouvoir divin
Afin de le cacher, nous rapporte la fable,
Là où jamais il ne pourrait le retrouver.
Oui, mais comment trouver un endroit introuvable ?
Alors il ordonna afin d’y arriver,
Que le conseil divin au ciel se réunisse.
A l’aréopage de tous les dieux mineurs
Il demanda alors en quel endroit propice
Ce pouvoir pourrait bien être caché sans peur
Que les hommes en cherchant un jour ne le retrouvent.
Ils proposèrent alors que sa divinité
Soit enfouie dans le sol. Mais Brahma désapprouve
Et leur dit, souriant de leur naïveté,
« Cela ne suffit pas. Il est inévitable
Qu’en creusant l’homme, un jour, mette la main dessus.»
« – Jetons donc son pouvoir dans la mer insondable,
Où il pourra rester toujours inaperçu.»
Mais leur nouvelle idée, sensée en apparence,
Fut aussi repoussée par le maître des dieux :
« L’homme ira jusqu’au fond des océans immenses,
Vous semblez ignorer comme il est ingénieux,
Actif, entreprenant et, avec son audace,
Il trouvera, c’est sûr, son grand pouvoir divin
Et le remontera alors à la surface. »
Les pauvres dieux mineurs cherchaient toujours en vain…
« Quelle cache pourrait donc empêcher les hommes
De retrouver un jour cette divinité ?
Nous n’avons toujours pas la solution en somme. »
Alors Brahma, qu’inspire une brusque clarté,
Leur dit, auréolé de sagesse suprême :
« Je sais maintenant où nous allons la cacher :
Nous la cacherons au plus profond de lui-même
Le seul lieu où jamais il n’ira la chercher. »
Et depuis ce temps-là, conclut cette légende,
L’homme explore, creuse, plonge, s’agite et court,
Toujours s’évertuant, qu’il monte ou qu’il descende ;
Ayant de la terre fait mille fois le tour,
Il remue en tous sens, constamment se dépêche
Ne s’arrêtant jamais ! N’est-il donc pas inouï
De voir cet être ainsi toujours à la recherche
Du bien le plus précieux caché au fond de lui ?
Arnaud Jonquet juin 2007