Le Silence

Quel bonheur lorsqu’enfin, à travers tout l’espace,
Un à un chaque bruit s’estompe et puis se tait ;
Quand des activités le bruissement s’efface
Et laisse la place à une indicible paix !

Je sais qu’il est osé de parler de silence
Même au cœur d’un poème où l’on fait peu de bruit,
Mais je dirai tout bas et sans forte éloquence
Le salutaire bien que le calme produit.

Certes l’on apprécie dans la vie quotidienne
D’ entendre la rumeur de ces bruits familiers,
Ces joyeuses clameurs ou proches ou lointaines
Qu’une oreille distraite accueille volontiers,

Ce sourd bourdonnement qui règne dans la ville :
Vacarme des chantiers, tapage des marchés,
Fracas constant d’une circulation fébrile,
Cris des cours d’écoles, sonneries des clochers…

On aime tous ces bruits qui reflètent la vie,
Nous stimulant gaiement dans nos activités,
Douce musique qui à l’action nous convie,
Chanson fredonnée par les rues de la cité.

Elle accompagne bien les tâches ordinaires
Égaye nos travaux sans pourtant nous troubler
Mais tout bruit empêche d’atteindre d’autres sphères,
Domaines subtils où l’âme peut s’envoler.

Comme le dieu Janus, l’être humain a deux faces
L’une nous est connue, c’est son être extérieur ;
L’autre reste inconnue et volontiers s’efface,
C’est le monde discret de son être intérieur.

Le silence absolu seul nous ouvre la porte
De ce vaste univers, mystérieux, ignoré,
Où la foi et l’amour infinis nous transportent
Au sommet de nous-mêmes en un temple sacré,

En notre moi profond, notre haute retraite,
Loin de l’agitation et du monde pesant,
Dans le calme infini de la chambre secrète
Et l’immobilité d’un repos apaisant.

Là, on laisse passer le flot de l’éphémère,
Tous les événements coulant au fil des jours,
Qui, comme des fétus sur l’onde passagère,
Disparaissent au loin au gré de l’eau qui court.

Tel l’oiseau libéré vers les hauteurs s’élance
A travers les champs clairs d’espace illimité,
L’âme et l’esprit échappent au monde d’alternance
Pour vivre de sublimes instants d’éternité !

  Août 2021